Mon nom est Loraine Brummer et je vis dans un petit village, Bow Valley, dans les collines du nord-est du Nebraska. Bow Valley est situé à environ 20 miles de Yankton, So. Dakota et 60 miles de Sioux City, Iowa. Une raison pour laquelle vous pouvez visiter notre ville est de voir notre belle Saints Pierre et Paul historiques église catholique.
Tuesday, September 20, 2011
Retour aux sources (deuxième partie)
Comment résumer trois semaines de vacances en un billet ? Je pourrais vous parler du Ramadan, avec lequel notre séjour en Turquie coïncidait, des feuilles de vigne farcies de ma maman ou encore des roses de mon grand-père. Cela vous intéresserait de savoir qu'un tambour passait tous les matins à 3h pour réveiller les fidèles, que ma maman congèle ses feuilles de vigne farcies ou que les roses de mon grand-père sont les plus belles. En réalité, ce n'est pas de ça dont je voudrais vous parler, en tout cas, pas tout de suite.
Je suis rentrée de vacances le mois dernier. Les traces de bronzage ont disparu et, avec elles, le souvenir des émotions que j'ai vécues pendant ces trois semaines en août. Lorsque je me relirai plus tard, je vais pourtant vouloir me souvenir de ma timide affection pour mon grand-père et de mon sentiment d'impuissance face à son mutisme. Je sourirai en revoyant ses sourires complices pour ma fille et en me rappelant sa bienveillance envers mon mari. Je repenserai aux cousins de ma maman, à leurs enfants qui n'en sont plus et qui ont quitté Izmir pour Istanbul. Je vais vouloir me raccrocher à mon souvenir de la petite ville d'Ilica, de sa longue plage, de ses cafés que l'on a rasés et de son restaurant familial, Kumrucu Hüseyin, où ma famille va depuis toujours. Comment pourrais-je oublier leurs sandwiches, les kumru, et leur thé, toujours servi trop fort ?
Je me demande parfois ce que sera la Turquie de demain. Dans 20 ans, aurai-je encore de la famille dans ce pays ? Si oui, où ? Sinon, y retournerai-je ? Je me suis longtemps demandé comme un si beau pays pouvait m'inspirer tant de tristesse et de mélancolie. J'ai conscience aujourd'hui d'assister à la disparition d'un monde, celui même dans lequel je puise mes racines.
Cette année encore, je n'ai pas quitté la Turquie les mains vides. Dans mes valises, quelques sachets de graines et l'espoir qu'elles germent sur le sol de Pennsylvanie. Dans mon appareil photo, une carte mémoire remplie de souvenirs, dont celui, précieux, d'une première rencontre. Dans mon carnet, deux nouvelles adresses électroniques, celles de deux cousines avec qui nous jouions aux cartes, l'été, lorsque nous étions petites. Je ne m'en souvenais même plus et c'est leur frère qui, les yeux brillants, me l'a rappelé cette année. L'une des sœurs sera en Caroline du Nord cet hiver et je vais tout faire pour la revoir. Ici ou ailleurs, l'histoire continue.
Sunday, September 11, 2011
Retour aux sources (première partie)
Nous sommes rentrés de Turquie il y a deux semaines et je viens tout juste de reprendre mes esprits. J'ai beaucoup de mal à gérer mes retours de vacances en famille et, comme si cela ne suffisait pas, nous avons été accueilli à notre retour par Irene, un ouragan qui nous a privés d'électricité pendant 32 heures, puis par une tempête tropicale qui a inondé la région. Maintenant que les choses sont à peu près rentrées dans l'ordre, je peux enfin me plonger dans mes photos de Turquie et revivre les plus belles émotions de mon séjour.
A une exception près, j'ai passé chaque été de mon enfance puis de mon adolescence en Turquie. Je ne garde pas forcément un souvenir très doux de ces séjours : le soleil, la mer bleue et le sable fin n'arrivaient pas toujours à me distraire de mon ennui, ni de ce curieux sentiment de ne pas appartenir. Ma sœur et moi parlions certes truc, mais avec un accent assurément frenchy, tandis que mon prénom français et ma peau trop claire suscitaient un flot constant de questions chez les autres enfants.
J'adorais en revanche revoir mes cousins d'Allemagne qui, eux, parlaient turc avec un accent allemand et me permettaient de me sentir moins seule, et mon grand-père qui a longtemps représenté une sorte de héros à mes yeux. Mon grand-père, c'est un vrai self-made man. Il qui a réussi seul, sans diplôme, grâce à un charme et une intelligence qui m'inspirent à ce jour. Il a toujours eu plein d'amis qui le respectaient partout et je me souviens même d'une famille qui lui était tellement redevable qu'elle avait construit des toilettes dans leur maison rien que pour lui, pour l'éviter d'aller au fond du jardin en pleine nuit. Moi, je l'admirais.
Les séjours en Turquie se sont fait plus rares lorsque je suis devenue étudiante et que les stages obligatoires en entreprise ont pris la place des vacances d'été. Je ne me suis pas plaint. J'ai ensuite quitté la France pour les Etats-Unis et, peu avant mon mariage, en septembre 2003, je suis allée faire un tour en Turquie, histoire de reserrer les liens avec mon histoire avant de changer de nom.
Je me souviens très bien de ces vacances qui marquaient en quelque sorte le début de ma vie d'adulte : les remarques sur mon prénom et ma pâleur me laissaient désormais indifférente, je découvrais le pays d'un nouvel œil, peut-être parce que j'avais enfin trouvé ma place dans le monde. Mes relations avec mes parents etaient moins orageuses que lorsque j'etais plus jeune et je profitais vraiment de leur tendre compagnie.
Juin 2010. Je ne suis pas retournée en Turquie depuis 7 ans et je ne reconnais plus rien : la région, autrefois paisible, où je passais chaque été, est devenue à la mode ; les cousins, que j'avais quittés enfants, sont devenus adultes ; mon grand-père, éternel bout-en-train, n'a plus le moral ; le marchand de glaces, chez qui nous avions nos habitudes, a pris la grosse tête. Je me sens perdue. Petit à petit, cependant, je me recrée une place dans ce ce pays. Chaque samedi, nous allons au marché avec ma maman et je me suprends à marchander avec les vendeurs. Tous les matins, nous mangeons le pain que mon père va chercher pour le petit-déjeûner. Je revois la famille, qui ne pas visiblement pas oubliée.
Le retour de vacances est difficile, je mets bien un mois avant de retrouver mes repères. Je me languis des roses, hibiscus et géraniums, qui poussent dans les jardins. Le parfum énivrant des figuiers me manque et je donnerais cher pour remanger le pain turc, à la mie légère et filante, aux Etats-Unis. Je suis la première surprise par cet élan soudain de melancolie, qu'est-il en train de m'arriver ?
Je n'ai pas besoin de chercher trop loin : il y a un morceau de moi en Turquie.
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