L’ordi est allumé depuis déjà 35 minutes, nous sommes debout depuis 9h et (quasi) réveillée depuis 4h50. Que s’est-il passé depuis tout ce temps ? Louloute a mangé, je l’ai lavé et habillé, j’ai chanté, j’ai négocié. Elle a vomi, je l’ai changé, elle a vomi, je l’ai essuyé. Elle s’est endormie une minute, j’ai espéré, elle a perdu sa tétine, elle a pleuré. On a marché du salon à la cuisine, et de la cuisine à la chambre. Il est 10h28, le papa n’est plus là, je ne suis pas ni lavée, ni habillée. Et j’ai faim. C’est une bonne journée qui s’annonce.
10h50 : 1er essai sieste. J’ai toujours faim, mais entre manger ou dormir, mon choix est fait ! On s’allonge, elle dort. Je retire mon pull, elle dort. Je me couvre, elle se réveille. Ok.
11h : Elle n’a plus sommeil, elle a la pèche ! Direction le tapis d’éveil et vas-y que j’te souris et que je gazouille ! Bref, elle s’éclate. Moi aussi !
11h20 : Son grand sourire se transforme en grimace, et la voilà qui pleure. Bon, maintenant je sais, ça veut dire que ça la fatigue et qu’il faut faire autre chose. Tiens, et si on graillait ?!
11h25 : Ah non. Finalement, j’aimerais bien que tu marches.
11h30 : Remontre un peu ton sein voir.
12h : Elle s’est endormit en tétant, j’ai toujours la dalle mais j’ai encore plus envie besoin de dormir. Direction le canap’, on s'allonge tel quel, je retiens mon souffle, ferme mes yeux et...
13h55 : ...le téléphone sonne. C'est le papa qui veut des news. "Ça va". Merde elle se réveille. Il a froid. Je m'en fous. Il a sommeil. Je m'en fous. Et voilà elle pleure.
14h33 : c'est vrai qu'il fait froid. Je branche le chauffage et glisse bébé(e) dans sa gigoteuse. Je fonds devant ce petit "sac" d'amour. Elle, elle fond...en larmes. Pourquoi? Tu as trop chaud? Je lui enlève. Elle pleure encore plus. Tu as faim? Non. Ce qu'elle veut, c'est mes bras. Ce qu'elle veut, c'est voir du pays. Je marche, donc. Jusqu'au frigo. Je choppe un paquet de parmesan râpé que je mange à même le sachet à la petite cuillère. Je m’approche en fourbe du transat et pendant qu’elle regarde ailleurs, je le tente. « Même pas en rêve, maman ! » Ok. Je suis pro-portage non ? Alors hop dans l’écharpe. J’ai presque plus faim et je suis presque en forme. Non, je déconne.
15h33 : 1 heure plus tard, rien n’a changé. Elle commence à sombrer. Moi aussi, mais pas dans le sommeil, dans une grave déprime !
15h45 : Elle ronfle. Je l’allonge, elle ouvre direct les yeux, elle pleure.
16h : Voir commentaire 15h45.
16h30 : Voir commentaire 16h.
17h : L’avantage c’est qu’au moins, je brule des calories.
17h10 : Dans sa grande bonté, elle me laisse m’assoir. Mais pas me pencher. Donc pas d’ordi. Ah et le téléphone elle aime moyen. Non. Madame veut que je lui parle. Je lui dis que Lou ça rime pas mal avec re-lou. Elle sourit la bougresse. Refais voir ton décolleté là.
17h40 : Bon il faut que je m’alimente moi aussi, je vois les étoiles. Je passe commande par téléphone.
18h15 : Ca sent bon, c’est chaud, c’est prêt, c’est à portée de fourchette…mais elle a re-faim.
19h50 : Elle a mangé, moi aussi. Elle a dormi, pas moi. Elle est calme, fraiche et dispo. C’est l’heure du bain. « Les petits poissoooons dans l’eauuuuu, naaaaage aussiiii bien que les groooos… » Ma petite sirène et moi, on profite de ce moment d’accalmie et de partage. Massage, crémage, câlinage, elle est relax. Et là dans un monde parfait, je m’imagine bien la poser à côté de moi sur sa peau d’agneau, la laissant s’endormir doucement, pouvant ainsi écrire ce billet tranquillement. Mais mon monde n’est pas parfait.
20h30 : Je ressors l’écharpe, que je n’avais pas vraiment rangée. Elle a ses yeux grands ouverts. Je lui parle, je lui raconte des histoires, je lui dis que je suis vraiment épuisée, que j’aimerais m’assoir, même juste 20mn. Elle me regarde, l’air désolé.
21h : Si je m’arrête de marcher, elle pleure. Si je m’arrête de parler, elle pleure. Si je m’assieds, elle pleure. Si je la pose, seule, elle hurle. Elle frotte sa tête contre ma poitrine et fais tomber sa sucette 10, 15 fois. J’ai mal au dos, au ventre, à la tête. Je tente une tétée-câlin, ça ne fonctionne pas. Ce qu’elle veut, c’est moi et moi entièrement. Que je sois tout à elle, à la regarder, à l’embrasser, à la caresser, à lui parler. Je le comprends, mais j’ai de plus en plus de mal à gérer. Il est hors de question que je la laisse pleurer, je ne le tolère pas, pas si jeune, pas quand il s’agit de ce besoin fondamental d’être rassuré et aimé. Je supporte, je respire, je ferme les yeux. C’est ma fille, mon bébé, mon monde.
22h : Je la supplie, limite en larmes, de me laisser me reposer, de me laisser m’asseoir. Je lui explique que je l’aime, que je sais comme ça doit être difficile pour elle de comprendre ses émotions, de les gérer, de grandir, d’être seule, hors de moi. Elle me fixe, boit mes paroles. J’appelle le papa, qui finit tard les lundis et mercredis. « Il faut que tu rentres, je craque ». Et je pleure, en la serrant contre ma poitrine. Elle finit par s’endormir.
23h13 : Je viens de la poser, elle ne dort plus, mais elle ne pleure plus non plus. Elle sourit. Si elle savait, elle rirait ! Elle ouvre grand la bouche, sa petite langue dehors. Elle ne me lâche pas du regard. J’ai comme l’impression qu’elle m’a écouté, qu’elle m’a entendu. C’est difficile de ne pas culpabiliser, difficile ne pas s’en vouloir. Il faut admettre que nous ne sommes pas des super héros. Que nous avons des limites. Limites qui viennent parfois heurter de plein fouet nos idéaux, nos convictions, nos désirs. Certains me diront « mais laisse la pleurer » : non. « Fais la garder » : non. « Alors te plains pas »
Toutes nos journées ne ressemblent pas à celle-là, elles ne sont pas si dures. Certaines seront pires. Je resterais là pour elle, à l’écouter, à composer selon ses besoins, le temps qu’il faudra. Et quand elle sera ado, je lui ferais payer !
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